Par Morgan Le Mat, le .
Il a été simultanément compris et oublié que les mots ne sont que des outils. Produits de contraste. Dispositifs en feedback de l'esprit au monde qui comprend l'esprit. Interfaces artificielles qui relient en divisant.
Il a été compris que les mots transportaient une part de culture avec eux par jeu de coproduction, par jeu de codistingo. Alors différents groupes ont commencé à bannir des mots ou à en réécrire le sens, de sorte que leur potentiel soit aligné sur les intérêts de ces groupes. Meta-warfare, guerre totale.
Le pauvre est devenu défavorisé. La victime de guerre un dommage collatéral. Maîtres et esclaves deviennent primaires et secondaires. Tous les groupes s'y mettent. À la fois lame de fond et épiphénomène.
Car le grand oublié, c'est la notion de contexte. Ce contexte qui fait qu'un mot peut-être offensant ou parfaitement anodin. Le grand oubli, c'est que le mot n'est pas autonome vis-à-vis de ce contexte. Et que donc il est polysémique, polymorphe, fluide. Le véritable phénomène de fond, c'est que les humains se rigidifient, s'accrochent au code au détriment du signal. Et alors le mot numérisé ne devient acceptable que s'il est standardisé et univoque.
Considérer des mots en dehors de tout contexte. Atomiser les sens. Codage ad nauseum du monde. Aseptisation totale des idées.
Cette entreprise est vouée à l'échec. Elle échoue déjà. Chacun s'accroche à son propre code. Certains croient que parce qu'ils ont pris la pillule rouge, ils sont sortis de la matrice. Ils ont mal regardé le film. Neo n'est pas sorti de la matrice, il s'est plongé dans une autre. Il a changé son contexte. Et c'est lorsqu'il l'a compris qu'il est devenu libre.
Au tiers de ma vie je n'ai plus peur
du vide
de la contradiction.
Tordre le langage, capter le réel
à travers les failles du vrai.
Suivre les chemins de traverse,
non pas en exilé
mais en aventurier.
Discret mais décidé
j'avance presque clandestin
sur ce territoire hostile.